Eve-Anne Durieux, professeure de Natha Yoga en Belgique et créatrice du très enrichissant blog VotreYoga.com, a posé quelques questions à Maud Perraud au sujet des bienfaits de la pratique du Yoga Prénatal... Vous souhaitant bonne lecture !
Comment as-tu découvert le yoga prénatal ? Qu’est-ce qui t’a amené à t’y former ?
Ce sont les demandes des femmes qui m’ont amené à me questionner sur ce que le yoga pouvait leur apporter de plus ajusté quant à ce qu’elles traversent durant la grossesse et aussi pendant l’accouchement.
J’ai commencé par faire un stage auprès de l’institut de Gasquet à Paris, qui se consacre en grande partie à l’accompagnement des femmes enceintes, puis j’ai continué à me former auprès
de Dominique Angelliaume, dont l’approche m’a ouverte à un travail du souffle (et du son) encore plus pointu.
Enfin, ces dernières années j’ai rassemblé des savoirs et des techniques concernant le périnée et plus largement la détente de la zone génitale ce qui, évidemment, participe grandement à l’accouchement et la suite de couche.
Pourquoi pratiquer le yoga prénatal ? Quels sont les bienfaits ?
Le yoga prénatal apporte plus de confort dans le corps à un moment où celui-ci traverse d’énormes modifications.
Le travail des postures permet d’ éviter que certaines douleurs s’installent, par exemple :
- au niveau de la colonne vertébrale
- du nerf sciatique
- du bas du ventre
- des intercostales
- etc…
En plus de soulager ou d’empêcher les inconforts et les douleurs , le travail de la posture a aussi pour objectif de préparer le corps à l’accouchement, principalement par un travail d’ouverture et de mobilité du bassin et du périnée.
Le travail du souffle et des sons permet une meilleure gestion du stress et de la fatigue. Il favorise une régulation, stabilise le mental et l’émotionnel.
Mieux on apprend à débloquer sa respiration pendant la grossesse, plus le souffle devient un allié puissant lors de l’accouchement.
Enfin, à travers les techniques de souffle et les consignes pour concentrer le mental, nous cherchons à goûter à un état qui favorise l’intériorisationet la profonde détente, deux aspects de première importance au moment de l’accouchement.
On va donc trouver plus de confort dans son corps, débloquer, allonger sa respiration ce qui apaise énormément le mental, et enfin, goûter à des espaces en soi, à soi, qui touche plus à l’intuitif et nous révèlent nos ressources profondes.
Comment se déroule une séance de yoga prénatal ?
L’un des objectif d’un cours de yoga prénatal est d’ apporter des outils concrets aux femmes enceintes, afin qu’elles puissent se les approprier et pratiquer chez elles en autonomie, si elles le souhaitent.
Plus nous prenons le temps d’approfondir une pratique, plus on s’y familiarise. Dans cette optique, la qualité, le durée, prime sur la quantité !
L’axe central du cours, c’est toujours le souffle.
1) Le début de séance
Tout d’abord, en début de séance, nous prenons le temps qu’il faut pour que chaque participante ramène sa respiration dans son bas ventre, autrement dit, ne garde pas cette respiration haute qui amplifie nos stress et notre fatigue.
2) Le coeur de la séance
Ensuite nous faisons l’expérience de l’allongement du souffle dans des postures choisies en fonction d’un objectif : soulager un zone du corps, ouvrir le bassin, stimuler le système digestif, la circulation sanguine etc.
Nous voyons au maximum trois ou quatres postures par cours, pas plus, afin de laisser le temps à chacune de ressentir, c’est à dire de faire l’expérience par son propre ressenti des bienfaits de chaque pratique, et cela demande forcément un peu de temps.
Il arrive aussi que nous choisissions des postures dites d’accouchement : des façons de se positionner, de bouger, de respirer que les femmes enceintes pourront réutiliser au moment de l’accouchement et qui favorisent le passage du bébé.
3) La fin de séance
Nous finissons par une observation de soi, durant laquelle il n’y a rien d’autre à faire qu’observer du dedans tout ce que les pratiques ont généré. C’est un temps essentiel qui permet à la mémoire du corps d’enregistrer les bienfaits , de sorte qu’il soit de plus en plus rapide d’en retrouver le chemin.
Beaucoup de femmes se demandent aussi quand reprendre le yoga après un accouchement.
Tout dépend des méthodes d’enseignements .
Il faut toujours poser la question à la professeure concernée et ce qui sera valable dans une école ne le sera pas forcément dans une autre.
On entend souvent qu’il est conseillé d’attendre d’avoir fait sa rééducation périnéale. Je dirai que c’est vrai pour un cours de postnatal qui s’oriente exclusivement sur un travail physique de musculation et assouplissement. Dans ce cas, effectivement, mieux vaut être au clair avec l’état de son périnée.
Dans un cours de postnatal qui s’appuie davantage sur le souffle, quand bien même il y a un travail postural, il est tout à fait possible de reprendre dès qu’on le souhaite . Certaines femmes sont arrivées en postnatal une semaine après leur accouchement. D’autres au bout de trois semaines. D’autres encore ont attendu plus d’un mois.
Il est possible de venir tôt parce que le cours est organisé de façon à ouvrir très largement l’éventail des propositions.
On peut venir avec son bébé, si on le souhaite ou si on n’a pas le choix. Même si on ne peut pas pratiquer beaucoup, parce qu’il faut allaiter ou bercer son enfant, il y a toujours des petits exercices de souffles et de postures à faire que l’on pourra transposer dans son quotidien.
En se basant sur des techniques de souffles du yoga traditionnel (en l’occurrence, avec des longues expirations et des rétentions à poumons vides), on pourra commencer à mobiliser en douceur son périnée, ainsi que la sangle abdominale, sans se mettre en danger dans des postures trop sollicitantes.
Et puis, au delà de la pratique, le cours de yoga postnatal est un lieu de rencontre et d’échange privilégié entre jeunes mères. C’est un cadre à part, car on n’est ni dans le médical ni dans son entourage, et cela amène souvent à de beaux et enrichissants échanges sur le sujet de la maternité.
Comment garder une continuité dans la pratique ?
C’est la grande question des gens qui pratiquent le Yoga ! Il n’est facile pour personne d’installer une routine dans la pratique. Alors on s’imagine bien qu’avec l’arrivée d’un bébé, ce n’est vraiment pas une mince affaire…
Commençons d’abord par déculpabiliser! L’arrivée d’un enfant bouleverse complètement la vie, il va sans doute falloir un peu de temps pour retrouver du temps à soi. Cela ne signifie pas qu’il faille faire une croix dessus, mais faire preuve d’indulgence envers soi-même.
J’aime beaucoup la notion de micro-pratique.La plupart du temps, lorsqu’on a envie de pratiquer, on est découragé parce qu’on n’a que 10 voir 5 minutes devant soi. Et bien, il n’en faut pas plus pour fermer les yeux, poser l’attention sur sa respiration, ramener le souffle dans son ventre.
Durant les cours de yoga postnatal, nous voyons toutes sortes de façon de pratiquer sur une courte durée. Mieux vaut être revenu 3 fois sur son souffle dans une journée, ne serait-ce que
3 minutes à chaque fois, que pas du tout. C’est ce qu’on appelle les micro-pratiques.
Car la pratique du Yoga est faite pour s’accorder à nos vies. Et chaque pratique, aussi succincte soit-elle, nourrit le lien à notre intériorité, donne une nouvelle saveur à notre journée, et laisse une empreinte délicieuse qui nous donne le goût d’y revenir.
Quels sont tes projets actuels et futurs ?
En tant que professeure de yoga, la formation n’est jamais finie, elle dure tant que dure la vie, car c’est un chemin, qui ne mène nulle part ailleurs qu’en soi, dans la réalité de l’instant.
Je continue donc à cheminer dans la tradition qui me touche au coeur, celle du Natha-Yoga, auprès de Christian Tikhomiroff et de Florent Leboucher, lors de stages et de formations.
A partir de cette année, je propose des cercles de paroles mensuels aux femmes autours de thématiques, notamment la maternité.
Je propose aussi tout un cycle de pratique sur le périnée,en partant d’une approche anatomique jusqu’à revenir à l’énergétique. Cela répond à de nombreuses demandes de femmes qui, pour des raisons diverses et variées, ressentent le besoin d’une rencontre avec cette région de leur corps.